Très en vogue, la notion d’estime de soi intéresse de plus en plus les psychologues du monde entier. On ne compte plus les ouvrages et autres méthodes destinées à la “booster“. Jusqu’à présent, l’estime de soi était avant tout associée aux valeurs personnelles. Mais d’après une récente étude menée sur plus de 5000 adolescents à travers le monde, il semble que cette notion soit liée à l’environnement culturel.
L'estime de soi dépend avant tout de notre environnement culturel.
De quoi dépend notre
estime de soi ? Selon les psychologues, tout dépendrait de nos valeurs personnelles : le fait d’accomplir les choses qui nous semblent les plus importantes (réussir professionnellement, aider les autres, privilégier son épanouissement personnel, etc.) est essentiel pour avoir une bonne estime de soi. Mais selon une récente étude publiée dans la revue Personality and Social Psychology Bulletin, il semblerait que ce soit un peu plus compliqué que cela…Une étude menée sur plus de 5000 jeunesPour les besoins de leur enquête1, l’équipe de Maja Becker, psychologue sociale au Laboratoire cognition, langue, langages, ergonomie (CNRS/Université de Toulouse II-Le Mirail) a suivi et interrogé depuis 2008 plus de 5000 adolescents et jeunes adultes de 19 pays, en Europe de l’Ouest, de l’Est, au Moyen-Orient, en Amérique du Sud, en Afrique et en Asie.D’après les résultats, il semblerait que les jeunes basent leur estime de soi sur le fait d’accomplir les valeurs dominantes chez les autres. Et comme ces dernières diffèrent grandement d’une culture à l’autre, les valeurs sur lesquelles se basent l’estime de soi changent selon notre pays.Des valeurs différentes selon les culturesSuite à leurs entretiens, les chercheurs ont déterminé 4 facteurs essentiels pour l’estime de soi, et ce, quel que soit le pays d’origine : remplir son devoir, aider les autres, améliorer son statut social et contrôler sa propre vie. Mais en fait, selon que l’on soit issu d’une culture occidentale, qui a plus tendance à valoriser la liberté et la réussite individuelle ou d’une culture orientale, plus tournée vers les autres, on accorde plus ou moins d’importance à chacune de ces notions.Par exemple, les jeunes occidentaux (Europe de l’Ouest et certaines régions d’Amérique du Sud) étaient plus susceptibles de tirer leur estime de soi du sentiment de contrôler leur propre vie alors que pour ceux issus de certaines parties du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Asie, c’est le sentiment de faire leur devoir qui les aidaient à se sentir mieux.L’estime de soi dépend aussi des autresEn conclusion, “l’estime de soi semble donc être essentiellement une entreprise collaborative et non pas individuelle, note le CNRS dans son communiqué. Ces travaux suggèrent que le système de construction de l’estime de soi est un moyen important par lequel les individus intériorisent les valeurs de leur culture à un niveau implicite, même s’ils ne prétendent pas adhérer à ces valeurs quand on le leur demande explicitement. Ces processus subtils peuvent encourager les gens à agir d’une manière souhaitable du point de vue de leur société et contribuer ainsi à maintenir une solidarité sociale2“.Yamina SaïdjSources : 1- Cette enquête a été réalisée par une équipe internationale appartenant au réseau « Culture and Identity Research Network » qui coordonne des recherches en psychologie sociale. Ces travaux à très grande échelle ont été financés notamment par des fonds publics anglais attribués par l’Economic and Social Research Council.2- L’estime de soi chez les jeunes est en grande partie d’origine culturelle, communiqué de presse CNRS, 13 février 20143- “
Cultural bases for Self-Evaluation: Seeing Oneself Positively in Different Cultural Contexts“, M. Becker and al, Personality and Social Psychology Bulletin, février 2014